Garde ce que tu as !

15.04.2012 / Apocalypse 2.18-29

La plus longue lettre est adressée à la ville la moins importante » (R.H. Charles)

18 A l'ange de l'Eglise de Thyatire, écris : Voici ce que dit le Fils de Dieu, celui qui a les yeux comme un feu flamboyant et dont les pieds ressemblent à du bronze : 

Thyatire était un grand centre commercial, située au croisement de deux routes importantes. La ville était célèbre pour son industrie de la teinture et du textile.  Elle connaissait une grande prospérité économique favorisée par la paix romaine.

La population était très mélangée et comprenait des Latins, des Grecs et des Orientaux, des Egyptiens et des Perses. Ce mélange explique une tendance au syncrétisme religieux.

Comme dans les autres villes, chaque profession avait sa confrérie et tout le monde s’attendait à ce que chaque artisant y participe sur le plan professionnel et social. Appartenir à une telle association impliquait la participation aux repas en commun, fréquemment dans l’enceinte même des temples, la nourriture ayant été préalablement offerte aux idoles. Souvent, ces repas dégénéraient en beuverie et même en orgie. 

Cela posait bien sûr un problème pour les chrétiens. Qu’elle attitude fallait-il que les chrétiens du temps de Jean adoptent ? 

Et aujourd’hui ? Si pour avancer sur le plan économique et social, il fallait fermer les yeux à certains agissements, jusqu’où un chrétien pourrait-il aller ? Jusqu’où pouvons-nous aller en participant à la vie économique et sociale de notre ville ? Qu’est-ce que nous sommes prêts à sacrifier sur l’autel de notre ascension socilale ? Notre vie de famille, notre mariage, notre participation aux activités de l’église ? 

Ces choix sont difficiles. Nous devons tous prier, réfléchir et prendre des décisions en fonction de ce que l’Esprit dit aux églises.

La description de Jésus, appelé «Fils de Dieu» 

De la tête aux pieds, le Seigneur Jésus-Christ manifeste la sainteté de Dieu. 

L’’Apocalypse révèle le conflit qui existe entre le vrai et le faux, entre le visible et l’invisible – et parce que nous sommes tentés, parce que nous souffrons et luttons dans le monde visible, nous avons besoin de comprendre ce qui se déroule dans le monde invisible ! Nous avons besoin de cette révélation du Seigneur qui marche avec nous et qui voit tout. C’est lui qui est là pour nous guider, pour détourner notre regard de tout ce qui risquerait de nous séduire. 

Jésus n’est pas à côté de toutes les prétendues divinités qui étaient adorées à Thyatire, mais face à elles. Dans cette confrontation, chacun devra choisir clairement son camp.

19 Je connais tes œuvres, ton amour, ta foi, ton service et ta persévérance ; je sais bien que tes dernières œuvres sont plus nombreuses que les premières. 

Jésus relève le positif d’abord. Il reconnaît à l’Eglise deux qualités intérieures : l’amour et la fidélité, qui ont produit deux qualités extérieures : le service et la persévérance. 

Une église qui aime le Seigneur, qui croit profondément en lui, qui s'investit de plus en plus dans l'œuvre de Dieu, qui ne se laisse pas décourager par les difficultés ni endormir par la routine. 

J'aimerais beaucoup être le pasteur d’une telle Eglise ! Que pouvons-nous entreprendre, chacun et chacune à notre niveau, avec nos différents dons, pour contribuer à ce que notre vie communautaire aient la qualité de celle de Thyatire ?

20 Cependant, j'ai ceci contre toi : tu laisses cette Jézabel, qui se dit prophétesse, égarer mes esclaves en leur enseignant à se prostituer et à manger des viandes sacrifiées aux idoles. 

Cela dit, le Seigneur a vu autre chose – il constate une église qui tolère l’erreur ! Elle a laissé  « cette Jézabel » égarer les serviteurs de Dieu en leur disant que le compromis avec le monde était acceptable. 

Notons que la critique ne concerne pas le fait que l’église tolérait la présence d’une femme qui enseigne, mais le grand reproche qui est fait à l’église de Thyatire est de la laisser enseigner l’erreur et séduire les véritables chrétiens, nés de nouveau, membres de cette église.

Historiquement, Jézabel, était la reine cananéenne, épouse du roi Achab (1 Rois 16 :30-33) qui rendit un culte à Baal, fit construire un temple en son honneur à Samarie et dressa un poteau sacré à la déesse Achéra – culte de fertilité donc. Le mariage d’Achab à Jézabel était vraisemblablement une alliance politique car les Sidoniens possédaient un port important. Ainsi, pour des gains politiques et économiques, Achab vendit son âme à Baal. 

La Jézabel de Thyatire introduisit dans l'Eglise une sorte de syncrétisme pagano-chrétien, non pas tant sur le plan doctrinal que sur le plan pratique : on mélangeait l'allégeance au Christ avec la participation aux cérémonies païennes. Solution séduisante pour les artisans et les marchands tiraillés entre leur fidélité au Christ et leurs intérêts économiques et professionnels.

Une partie de l'église l'a suivie, d'une part parce qu'elle était éloquente, et d'autre part parce que cela les arrangeait bien : ils pouvaient être chrétiens avec une bonne conscience tout en participant aux activités de leurs corporations et en profitant des avantages que cela leur apportait. Avec ce compromis, leur vie chrétienne devenait tellement plus facile et agréable !

Plus de cas de conscience ! Vous pouvez tranquillement participer aux fêtes de votre guilde leur disait-elle ; un chrétien est un homme libre ; les idoles ne sont rien et l'âme n'est pas affectée par ce qui se passe dans le corps selon l’enseignement de Jézabel. 

Nous avons beaucoup de peine à accepter, à la longue, que la vie chrétienne n’est pas une vie confortable dans ce monde. Jésus a parlé de porte étroite, de chemin étroit pour représenter la vie du disciple. Nous aimons bien écouter ceux qui nous la rende plus confortable en éliminant toutes les tensions, les réflexions, les renoncements qu’entrainent le choix de suivre Jésus.

21 Je lui ai donné du temps pour qu'elle change radicalement, mais elle ne veut pas revenir de sa prostitution. 22 Je vais la jeter sur un lit et dans une grande détresse, elle et ceux qui commettent l'adultère avec elle, à moins qu'ils ne reviennent de ses œuvres. 

23 Je ferai mourir ses enfants ; toutes les Eglises sauront que c'est moi qui sonde les reins et les cœurs, et je vous rendrai, à chacun de vous, selon ses œuvres. 

Le temps de la repentance. Pour tous les égarés, il y a un temps de patience donné par Dieu pour se repentir. 

Jésus dit avoir déjà laissé du temps à « Jézabel » pour se repentir et changer de comportement. 

D’un lit à l’autre, le jugement annoncé correspond au péché commis, au lieu d’un lit de séduction il est question d’un lit de souffrance. 

Cela peut paraître sévère, mais c’était nécessaire pour que le Seigneur permette à la vie de son Eglise de se poursuivre. Si chacun ne s’examine pas soi-même, chacun ne peut échapper au regard de feu du Seigneur. 

Mais tous n’ont pas été égarés !

24 Mais à vous, à tous les autres de Thyatire, qui n'ont pas cet enseignement et qui n'ont jamais connu les « profondeurs » du Satan, comme ils disent, je dis : je ne mets pas sur vous d'autre fardeau. 

25 Seulement, ce que vous avez, restez-y attachés jusqu'à ce que je vienne.

Aux fidèles, Jésus ne donne qu’un seul commandement – de rester attaché à ce qu’ils avaient. Une seule chose importe ! Rester fidèle ! 

Cela nous renvoie aux simples consignes du Concile de Jérusalem – Actes 15 : 28ss. 

28En effet, le Saint-Esprit et nous-mêmes avons décidé de ne vous imposer aucun fardeau en dehors des devoirs suivants qui sont indispensables : 29ne pas manger de viandes provenant de sacrifices offerts aux idoles ; ne pas manger de sang, ni de la chair d'animaux étranglés ; vous garder de l'immoralité. Vous agirez bien en évitant tout cela. Fraternellement à vous ! »

26 Au vainqueur, à celui qui garde mes œuvres jusqu'à la fin, je donnerai pouvoir sur les nations. 27 Avec un sceptre de fer il les fera paître — comme on brise les vases d'argile, 28 ainsi que j'en ai moi-même reçu le pouvoir de mon Père. Et je lui donnerai l'étoile du matin.

Les chrétiens fidèles semblaient totalement écrasés par les puissantes exigences des confréries, mais le Seigneur inverse les rôles ! Jésus promet que le chrétien fidèle sera élevé au point de régner avec lui (voir aussi 2 Tim 2 :12 « si nous persévérons, nous règnerons aussi avec lui. »

De plus, Jésus lui-même lui donnera l’étoile du matin, voir Apocalypse 22 :16 où Jésus se désigne ainsi. Il se donne lui-même à celui qui résiste, ainsi il n’aura rien à craindre.

29 Que celui qui a des oreilles entende ce que l'Esprit dit aux Eglises ! 

Comment pouvons-nous résister aujourd’hui face à la séduction du monde ? Comment éviter la compromission ? Comment vivre au Locle, à Paris, à Londres ou à New York sans être engloutis par la vague de matérialisme qui semble tout emporter aujourd’hui ? Comment tenir ferme au lieu de chercher de l’avancement au prix de notre vie de famille, de notre vie d’église ? Cela fait depuis 2000 ans que l’église est engagée dans cette lutte-là, être dans le monde sans être du monde. 

Certains chrétiens se sont retirés du monde et vivent dans des monastères ou dans des couvents. D’autres se sont réfugiés dans différentes formes de légalisme, mais ce n’est pas ça que nous trouvons ici.

Je crois que les choses sont devenues plus subtiles. 

Mais la société n'aime toujours pas ceux qui s'en démarquent. "Non les braves gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu'eux" chantait Brassens à juste titre.

Comme Jésus, nous avons à cultiver la volonté d’être différence, de «think different», mais pas associer à la volonté du retrait. C’est exigeant. L’apôtre Pierre invite à nous considérer comme des «immigrés» = «gens de la maison d’à côté», des décalés et à assumer cette position inconfortable.

Le secret du décalage, de la différence, de la résistance et de la victoire se trouve dans l’injonction de – « restez attacher à ce que vous avez » ! 

Il faut s’accrocher certainement à la Bible, la Parole de Dieu – il nous l’a laissée pour nous nourrir, nous soutenir, nous faire grandir. Dans le contexte plus spécifique de l’Apocalypse, il faut rester accrocher à Jésus-Christ.

Ce que nous avons : la Bible et Jésus-Christ. 

La Bible n’est pas quelque chose de magique. Elle est importante parce qu’elle rend témoignage à Jésus-Christ. Ce livre de l’Apocalypse parle constamment de lui comme quelqu’un qui contrôle la situation et qui est présent dans notre vie quotidienne. Comme les chrétiens de Thyatire, nous avons besoin d’une vision renouvelée de Jésus. 

Qu’Il nous éblouisse pour que nous ne soyons plus éblouis par le monde. Ou plutôt qu’Il nous éclaire !